Ne dépassons pas les bornes des limites Maurice !
Bon bah là si c'est pas un signe que je devais faire un article sur ce sujet., je ne m'y connais pas.. d'abord l'envie depuis un petit moment mais je ne savais pas trop par quel bout l'attraper, puis l'intervention de Séverine dans les commentaires du dernier post (merci à elle) et enfin le dernier numéro de Grandir Autrement (génial sur les limites, à lire et à recommander comme toujours !). Donc, allez, je m'y colle même si je suis sure que je vais oublier beaucoup de choses et qu'au fur et à mesure que lulu grandira le sujet reviendra et nos réactions évolueront... En attendant dans la bibouillette family la recherche des limites et la gestion des conflits se passent comme ça...
Caprice, punition, tape sur la main, fessée, isolement, coin… en discutant avec d’autres parents, en regardant autour de nous, en surfant sur les forums, voilà autant de notions qui apparaissent au fur et à mesure que nos bambins grandissent, gagnent en autonomie et en envies. A en croire la vindicte populaire, nous n’y échapperons pas. Nous aussi, avec lulu, nous serons bien obligés de prendre le dessus avec, en filigrane telle une sentence, un mot, un seul : LIMITES !
Pourtant, plus on en discute avec le doudou et plus on est convaincu qu’il y a différentes façons de poser des limites sans entraver la liberté et la personnalité de lulu. Plus on s’informe, plus on lit, plus on regarde du côté de l’éducation consciente et moins on a envie d’entrer dans le cercle infernal de la lutte de pouvoir. Car oui, plus on se penche sur le sujet, plus on à l’impression que la société fait croire aux parents que l’éducation c’est une lutte, une bataille au quotidien avec son enfant. Soit le parent gagne, soit l’enfant lui marche sur la tête. Et pourtant, d’où vient cette peur ? Comment en est on arrivé à porter sur nos bout’chous un regard suspicieux… comme s’ils étaient l’ennemi qu’il faut "mater", comme s’ils étaient des petits manipulateurs qui vont tout mettre en œuvre pour prendre le pouvoir à la maison ?
A bientôt deux ans, nous n’avons jamais ressenti le besoin ou l’envie de punir, mettre au coin, isoler voir donner une fessée à Lucile. Pourtant comme tous les enfants, lulu râle, chouine, rouspète voir crie ou hurle carrément. Bien sûr ! Comme tous les enfants lulu nous "tient" parfois tête, refuse de faire ce qu’on lui demande, recommence 25 fois ce qu’on vient de lui interdire. Bien sûr ! Notre Bibouillette a du caractère (ni "bon", ni "mauvais", ni "sacré", ni…. Bref juste "du" caractère)… Mais là où beaucoup de personnes choisissent de voir un caprice ou une crise nous essayons de toujours porter un regard empathique sur notre puce. Nous refusons ainsi de "catégoriser" lulu. Pas question de lui coller une étiquette, de dire qu’elle est "dure", "facile", "capricieuse", "bonne pâte"… et pas question non plus de considérer ses "réactions" comme des actions contre nous, des choses qu’elle ferait pour nous embêter, rendre dingue ou énerver.
Quand l’un de ces moments apparaît, nous essayons toujours de comprendre ce qui se passe et surtout ce qui ce joue en elle et en nous. Qu’est-ce que vit / ressent lulu ? Qu’est-ce que je peux/dois faire ? Quelle attitude adopter ? Au fur et à mesure que les mois passent, nous avons pu définir que les "crises" interviennent généralement :
- quand on ne respecte pas un besoin de Lucile (celui de jouer encore, d’expérimenter, de se défouler…),
- quand elle est fatiguée/stressée/frustrée
Nous avons ainsi, en fonction du moment, de la cause, de notre ressenti (et de notre propre état de fatigue) différentes façons d’affronter cette "crise". Mais avant cela, nous essayons déjà de voir si cette crise est provoquée par un refus, un interdit de notre part, si celui-ci est finalement justifié. Bah oui, autant être franc, bien souvent les parents disent "non" un peu par automatisme, parce qu'ils ont été élevés comme ça, parce que, finalement, c'est "eux qui décident" ! On a bien sur, nous aussi, cette tendance naturelle à imposer parfois une règle qui, quand on la regarde de plus près, est totalement arbitraire. Et finalement, il suffit parfois de lâcher du lest sur quelque chose qui n'a en fait pas vraiment d'importance pour nous ou revoir nos attentes à la baisse en fonction des capacités de notre enfant pour que la situation s'apaise d'elle-même.
Parfois, cette attitude ne correspond pas à la situation et nous faisons donc appel à d'autres méthodes :
1 – le jeu : c’est vraiment un moyen formidable de désamorcer bien des situations et de faire "passer" certaines pilules aux enfants. Là où les cris, les menaces et le chantage fonctionneraient peut-être, nous choisissons pour notre part un moyen bien plus rigolo pour tout le monde : une bonne séance de rires, de jeux de rôle et de grand n’importe quoi. A ce sujet, un livre dont j'ai déjà parlé mais que j'ai vraiment adoré sur le sujet. Quelques exemples parmi tant d’autres :
- Il est 19h30 lulu refuse d’aller au bain. Elle veut "encore" jouer au bébé, à la dinette, lire un livre… dans un premier temps, plutôt que d’entre en "bataille" on repousse le bain. Après tout pourquoi "imposer" un horaire arbitraire ? Lulu s’amuse, il n’y a pas d’urgence. Un peu plus tard, lorsque les premiers signes de fatigue apparaissent, on passe au plan B. Là encore, pas de "prise" de force, pas de mise au bain sous les hurlements. Lulu veut jouer, pas de soucis. On fait de ce moment une suite du jeu. Papa transforme lulu en grenouille qui bondit de marche en marche en poussant de grand croaa, croaaa. On se jette sur le lit pour faire des roulades tout en essayant de retirer les chaussures, les chaussettes, le pantalon de la mistinguette. Au final, la poupée dans le bain attend Lucile en chantonnant pour faire des bulles, tremper papa… bref, un grand moment de jeu.
- Lulu doit prendre un suppo et elle déteste cela. Là encore, on transforme ce moment en "jeu". Papa pratique un petit tour de magie sur le suppo pendant que maman s’apprête à envoyer la fusée en super-vitesse. Et puis, oups… tout à coup… mince ! il est où ? mais il est passé où ? Lulu tu l’as vu ? je l’ai perdu ? Ouvre ta bouche, montre tes oreilles, mince il est tombé par terre ? Et lulu écroulée de rire " malgré le moment désagréable" nous répète qu’il est partit dans la lune, ayééé, là, en nous montrant ses p’tites fesses !
- Lulu en a marre d’être dans le chariot, pendant les courses : là encore plusieurs possibilité : lui confier telle une super mission un des articles de la liste, lui laisser un jouet ou un livre que l’on reposera en rayon plus tard, ou parcourir avec le caddy les allées du magasin en "super vitesse"… bon ok en croisant le regard interloqué des papys mamies on comprend qu’on détonne un peu mais bon… ça marche bien, c’est l’important.
2 – Recevoir ses émotions : et oui, lulu a le droit d’être frustrée, énervée, en colère, fatiguée.. et oui, comme nous, elle a le droit d’être de mauvaise humeur, grognon, voir carrément intenable. Dans ces moments là, la théorie du "biscuit cassé" de Solter prend toute son ampleur. Un petit acte anodin (d’où l’exemple du dernier biscuit du paquet – cassé) déclenche une réaction incontrôlable chez notre enfant. Si l’on cède, très vite, une autre raison remplacera la première pour poursuivre la crise jusqu’à atteindre son paroxysme. Dans ce cas là, chez nous, une seule réaction : contenir Lucile dans nos bras et lui permettre d’exprimer sa colère, fatigue, frustration… L’écouter avec empathie, en étant à 100% avec elle, sans émettre de jugement de valeur. Lui permettre de se vider pour refaire le plein ensuite.
Voilà pour l'instant, à 23 mois, où nous en sommes avec lulu en matière de pose des limites et d'éducation consciente. Nous savons qu'au fil des mois, des années, nous devrons nous adapter, évoluer et innover pour trouver de nouvelles réponses. Mais quelle richesse ! Je me dis que si nous nous contentions de crier sur lulu, de la mettre au coin et de lui coller une fessée nous y perdrions tellement... tellement dans notre relation à elle mais aussi dans notre relation à nous-même !